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« Notre corps stocke des graisses afin de constituer des réserves d’énergies. Par « lipœdème» on entend le stockage anormalement localisé de ces graisses, le plus souvent réparties des hanches aux chevilles.
Le lipœdème est une maladie reconnue par l’Organisation mondiale de la santé depuis 1940. Il peut passer par 4 phases aux cours desquelles les symptômes s’aggravent. Sans traitement la quantité des graisses sous la peau peut aller de 0,5 à 7 ou 8 litres. Ceci entraîne des difficultés à se mouvoir et donc à éliminer naturellement les graisses du corps. Des douleurs peuvent également survenir dès la phase 1.
À ce sujet, j’aimerais poser les questions suivantes à Monsieur le Ministre de la Sécurité sociale :
- L’opération du lipœdème est-elle considérée comme intervention de chirurgie esthétique? Dans l’affirmative, pour quelles raisons?
- En termes de prévention, Monsieur le Ministre ne juge-t-il pas utile de rembourser des interventions chirurgicaux de lipœdème dès la phase 1 afin d’éviter l’aggravation des symptômes? Dans la négative, pour quelles raisons?
- Dans la réponse à la question parlementaire N°3404 du 8 janvier 2021, Monsieur le Ministre a expliqué que la Commission de Nomenclature a décidé d’introduire deux nouveaux actes pour le traitement du lipœdème en phase 3. Monsieur le Ministre, peut-il fournir des précisions concernant ces nouveaux actes? »
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− L’opération du lipoedème est-elle considérée comme intervention de chirurgie esthétique ? Dans l’affirmative, pour quelles raisons ?
Le lipœdème est à considérer comme une maladie. En effet, les signes cliniques du lipœdème sont décrits depuis 1940 par Allen et Hines (Vignes 2012). Néanmoins la maladie reste encore méconnue car peu d’études scientifiques sont disponibles, et les recommandations de bonne pratique sur la prise en charge du lipœdème sont quasi inexistantes (Rey & Raffoul 2018).
D’après le catalogue des maladies rares recensées par Orphanet, on y retrouve que le lipœdème est une maladie génétique rare du tissu sous-cutané. Néanmoins, la Classification internationale des maladies (CIM-10) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ne prévoit pas, au même titre que pour de très nombreuses maladies rares, de code spécifique pour le « lipœdème ».
Dès lors, considérant que le lipœdème est reconnu comme une maladie, les actes chirurgicaux en lien avec cette pathologie ne sauraient être qualifiés de chirurgie esthétique.
− En termes de prévention, Monsieur le Ministre ne juge-t-il pas utile de rembourser des interventions chirurgicaux de lipoedème dès la phase 1 afin d’éviter l’aggravation des symptômes ? Dans la négative, pour quelles raisons ?
Tel que précisé ci-avant, la maladie reste encore assez méconnue car peu d’études scientifiques sont disponibles, et les recommandations de bonne pratique sur la prise en charge du lipœdème sont quasi inexistantes.
De plus, la littérature n’est pas toujours cohérente concernant le diagnostic ou la prise en charge du lipœdème. Le lipœdème étant souvent mal diagnostiqué ou diagnostiqué comme un problème esthétique, il est trop fréquemment insuffisamment ou mal pris en charge. Pour diagnostiquer un lipœdème et permettre sa prise en charge adéquate, il est impératif de différencier le lipœdème de la lipohypertrophie, de l’obésité ou encore du lymphœdème.
La prise en charge du lipœdème poursuit deux objectifs principaux :
L’élimination ou l’amélioration des symptômes, en particulier la douleur, l’œdème et la déformation articulaire pour réduire le handicap.
La prévention des complications dermatologiques (macérations, infections), lymphatiques (érysipèle, lymphœdème) et orthopédiques (troubles de la marche, déformations articulaires).
Le traitement du lipœdème consiste en une prise en charge globale, qui doit toujours être adaptée à chaque individu en fonction du stade de la maladie.
Les modalités de remboursements de la prise en charge chirurgicale du lipœdème à l’étranger oriente globalement vers la prise en charge chirurgicale du lipœdème à partir du stade 3 de la maladie. A contrario, en Grande-Bretagne, le National Health Service (NHS) autorise un accès limité à la chirurgie, la considérant comme une procédure cosmétique pour laquelle les patients souffrant de lipœdème n’ont pas droit à une prise en charge (Wounds UK 2017).
Pour l’ensemble de ces raisons, et dans l’attente de recommandations internationales validées de bonne pratique sur la prise en charge du lipœdème, le choix initial a été de permettre le remboursement de la prise en charge chirurgicale à partir du stade 3.
− Dans la réponse à la question parlementaire N°3404 du 8 janvier 2021, Monsieur le Ministre a expliqué que la Commission de Nomenclature a décidé d’introduire deux nouveaux actes pour le traitement du lipoedème en phase 3. Monsieur le Ministre, peut-il fournir des précisions concernant ces nouveaux actes ? »
En ce qui concerne les nouveaux actes relatifs au traitement du lipœdème à partir de la phase 3, il s’agit de deux actes permettant la prise en charge des interventions chirurgicales y relatives par l’a ssurance maladie, tant pour les membres inférieurs que pour les membres supérieurs.
En effet, le Comité quadripartite du 30 mai 2018 avait fixé des objectifs d’amélioration de la prise en charge du lipœdème, tant au niveau du traitement conservateur que des interventions chirurgicales à partir du stade 3 de la pathologie.
La prise en charge du lipœdème par liposuccion a démontré des bénéfices notables pour les patients atteints de cette pathologie, sur les symptômes associés, et engendre une amélioration de l’impotence fonctionnelle liée.
La création de ces nouveaux actes permet d’éviter la situation dans laquelle le médecin doit appliquer la procédure de l’article 19, alinéa 3 du Code de la sécurité sociale (tarification par analogie) pour une intervention prévue au niveau des statuts de la Caisse nationale de santé et absente au niveau de la nomenclature médicale.
Les modifications de la nomenclature sont opérées par règlement grand -ducal qui se trouve actuellement dans la procédure règlementaire. À ce stade, les nouveaux actes prévoient une autorisation préalable du Contrôle médical de la sécurité sociale. Toutefois, il est envisagé de faire une évaluation de cette condition une fois que des données plus précises seront disponibles.
Au-delà des mesures qui ont été prises ces dernières années pour renforcer la prise en charge par l’assurance maladie en ce qui concerne le lipoedème, y compris les nouveaux actes, la prise en charge sera continuellement réévaluée en fonction des dernières connaissances médicales et des dernières techniques médicales dès lors qu’elles répondent aux différents critères prévus au Code de la sécurité sociale.