Fro
« La Caisse national de santé (CNS) a saisi en 2020 1.163.452 certificats d’incapacité de travail. Cela représente une augmentation globale de plus de 40 % par rapport à l’année précédente, surtout perceptible au cours du mois de mars 2020 avec une augmentation de 52 %.
À ce sujet, j’aimerais poser les questions suivantes à Monsieur le Ministre de la Sécurité sociale :
- Monsieur le Ministre dispose-t-il de précisions sur les secteurs le plus gravement touchés par cette augmentation des incapacités de travail ?
- Est-ce que la durée globale des incapacités de travail continues a également augmenté ? Dans l’affirmative, de combien de jours en moyenne ? Et existe-t-il un lien entre cette augmentation et la non-prise en compte des jours en incapacités de travail pour le calcul de la fin du droit à l’indemnité pécuniaire pendant l’état de crise ?
- Combien de certificats de maladie ont été renouvelés en 2020 ? Combien de jours ont duré ces extensions en moyenne ?
- Les demandes pour le congé pour raisons familiales, accordées sur présentation d’un certificat médical d’un enfant malade à charge du salarié et âgé de moins de 18 ans (sauf cas particulier), figurent-elles parmi le chiffre des certificats d’incapacité de travail saisis par la CNS depuis le mois de mars 2020 ? Dans l’affirmative, quelle est la part du congé pour raisons familiales, ventilée par mois ? Dans la négative, Monsieur le Ministre peut-il fournir des précisions sur le nombre et la durée des congés pour raisons familiales pris en charge ? »
Äntwert
Monsieur le Ministre dispose-t-il de précisions sur les secteurs les plus gravement touchés par cette augmentation des incapacités de travail ?
L’augmentation de 40% du nombre de certificats d’incapacité de travail (CIT), saisis par la Caisse nationale de santé (CNS) en 2020, est révélatrice de l’impact qu’a eu la crise sanitaire causée par la pandémie de Covid-19 sur les absences au travail.
En matière d’absences au travail, les analyses que produit l’Inspection générale de la sécurité sociale (IGSS) ne reposent toutefois pas sur les CIT, mais sur les épisodes d’absence. En effet, certaines absences ne sont pas assorties d’un CIT (une partie des absences courtes de moins de 3 jours). Ainsi, en se limitant au CIT, l’absentéisme au travail est sous-estimé. En outre, certains CIT relèvent de la même absence (un même épisode d’absence peut être associé à deux CIT en cas de prolongation par le médecin) et peuvent se chevaucher. Dans ce cas, l’IGSS retraite les CIT afin de supprimer les chevauchements et fusionne les CIT consécutifs. Ainsi, en tenant compte des absences sans CIT, en retraitant les chevauchements et en fusionnant des CIT consécutifs, l’IGSS construit les épisodes d’absence qui constituent son unité d’analyse.
A partir des épisodes d’absence, l’IGSS a développé plusieurs indicateurs permettant de mesurer et de suivre l’évolution de l’absentéisme au travail. Parmi ces indicateurs figurent la part des personnes absentes au moins une fois au cours d’une période donnée, le nombre moyen d’épisodes d’absence par personne absente et la durée moyenne des épisodes d’absence. Ces informations sont ensuite restituées de manière synthétique par le biais d’un taux d’absentéisme (nombre de jours d’absence rapporté au nombre de jours d’occupation). Le tableau n°l reprend les valeurs de ces indicateurs pour les absences des salariés de statut privé1 2 ainsi que leur progression respective entre 2019 et 2020.
Tableau n°1 : Indicateurs de l’absentéisme pour 2019 et 2020 (salariés de statut privé)
En 2020, le taux d’absentéisme global (tout type d’absence) s’est établi à 7,0%, contre 5,0% l’année précédente, affichant ainsi une progression de +39,6%. Cette dernière résulte d’une augmentation de la part de salariés absents au moins une fois (62% en 2020, contre 59% en 2019), d’une augmentation du nombre moyen d’épisodes d’absence par personne abs.ente (3,5 en 2020, contre 3,1 en 2019) et d’une augmentation de la durée moyenne des absences (10,4 jours en 2020, contre 8,7 en 2019). Globalement 1 014 343 épisodes d’absence ont été dénombrés en 2020, nombre en augmentation de 19,0% par rapport à 2019 (l’encadré n°1 réconcilie la progression des épisodes d’absence et celle des CIT).
Encadré n°l: Progression du nombre d’épisodes d’absence et progression du nombre de CIT
Entre 2019 et 2020, les CIT saisis par la CNS ont progressé de +40%. Sur la même période, les épisodes d’absence ont progressé de +19%. Cet encadré retrace, en trois étapes, les opérations permettant de réconcilier ces deux progressions :
Etape n°l: L’année de saisie du CIT ne correspond pas forcément à l’année de l’absence. En effet, une partie des CIT saisis en 2020 (resp. 2019) se rapporte à des absences ayant eu lieu en 2019 (resp 2018). Aussi, s’il est tenu compte de l’année à laquelle renvoie le CIT et non plus de l’année au cours de laquelle il a été saisi, le taux de progression passe de +40% à +35%.
Etape n°2 : Les CIT peuvent relever de la même absence (un même épisode d’absence peut être associé à deux CIT en cas de prolongation par le médecin) et peuvent se chevaucher. Après traitement des chevauchements et fusion des CIT consécutifs, le taux de progression obtenu à l’issue de l’étape n°l passe de +35% à +31%.
Etape n°3 : En 2020, le nombre d’absences sans CIT a diminué. La progression des CIT est, par conséquent, plus importante que celle de l’ensemble des absences (avec et sans CIT). Aussi, après prise en compte des absences sans CIT, le taux de progression obtenu à l’issu de l’étape n°2 passe de +31% à +19%.
Concernant le type d’absence, la progression du taux d’absentéisme global résulte principalement de l’augmentation des absences pour cause de congé pour raisons familiales (elle explique 63% de la hausse du taux global) et de l’augmentation des absences pour cause de maladie (35% de la hausse du taux global) (tableau n°2).
Tableau n°2 : Taux d’absentéisme selon le type d’absence pour 2019 et 2020 (salariés de statut privé)
Au niveau sectoriel, l’analyse du taux d’absentéisme global révèle que les secteurs les plus touchés par l’augmentation de l’absentéisme en 2020 sont ceux de l’immobilier et des autres activés de service (principalement des activités des ménages en tant qu’employeurs). A l’opposé, le secteur financier et celui de l’hébergement et de la restauration affichent la progression la moins forte (tableau n°3).
Tableau n°3 : Taux d’absentéisme global selon le secteur d’activité pour 2019 et 2020 (salariés de statut privé)
Est-ce que la durée globale des incapacités de travail continues a également augmenté ? Dans l’affirmative, de combien de iours en moyenne ? Et existe-t-il un lien entre cette augmentation et la non-prise en compte des iours en incapacités de travail pour le calcul de la fin du droit à l’indemnité pécuniaire pendant l’état de crise ?
Entre 2019 et 2020, la durée moyenne des épisodes d’absence (tout type d’absence) est passée de 8,7 à 10,4 jours civils et a ainsi progressé de +19,6%.
La non-prise en compte des jours d’incapacité de travail pour le calcul de la fin du droit à l’indemnité pécuniaire pendant l’état de crise a contribué de façon marginale à l’augmentation de la durée moyenne des absences, le nombre de personnes concernées étant relativement faible. L’IGSS estime que sans cette mesure, la durée moyenne aurait progressé de +19,3%, contre +19,6% observés.
A noter que le nombre d’épisodes d’absence, par personne absente, a également progressé en 2020, passant de 3,1 à 3,5 (+12,8%). Il en découle ainsi une progression de +34,9% du nombre de jours d’absence par personne absente.
Combien de certificats de maladie ont été renouvelés en 2020 ? Combien de iours ont duré ces extensions en moyenne ?
Il n’existe pas, dans les bases de données de la sécurité sociale, d’information permettant d’identifier les CIT qui ont été renouvelés. Toutefois, il semble raisonnable de considérer qu’une bonne approximation du nombre de renouvellements peut être obtenue en retenant tout CIT qui chevauche le précédant ou qui lui est consécutif. Selon cette approche, 296 000 CIT ont été prolongés en 2020 de 17 jours civils en moyenne.
Les demandes pour le congé pour raisons familiales, accordées sur présentation d’un certificat médical d’un enfant malade à charge du salarié et âgé de moins de 18 ans (sauf cas particulier), figurent-elles parmi le chiffre des certificats d’incapacité de travail saisis par la CNS depuis le mois de mars 2020? Dans /’affirmative, quelle est la part du congé pour raisons familiales, ventilée par mois ? Dans la négative, Monsieur le Ministre peut~il fournir des précisions sur le nombre et la durée des congés pour raisons familiales pris en charge ?
Les demandes pour le congé pour raisons familiales (CPRF), accordées sur présentation d’un certificat médical d’un enfant malade à charge du salarié et âgé de moins de 18 ans, sont effectivement reprises dans le chiffre des CIT saisis par la CNS. Le tableau n°4 reprend la ventilation mensuelle du nombre de salariés du privé ayant bénéficié du CPRF (lié ou non à la pandémie de Covid-19), ainsi que de la part représentée par le CPRF dans l’ensemble des épisodes et des jours d’absence.
Tableau n°4 : Congé pour raisons familiales {CPRF} en 2020: Ventilation mensuelle du nombre de bénéficiaires, de la part des jours d’absence ainsi que de la part du nombre d’épisodes par rapport à l’ensemble (salariés de statut privé)
En 2020, les jours d’absence liés au CPRF ont représenté 19,0% de l’ensemble des jours d’absence (1,4% en 2019). Les épisodes d’absence liés au CPRF ont, quant à eux, représenté 27,6% de l’ensemble des épisodes d’absence. A noter les valeurs particulièrement élevées de ces ratios au cours des mois de mars à juillet, consécutives à l’élargissement du champ d’application de la prorogation du CPRF (mises en quarantaine, isolement et maintien à domicile d’enfants pour raisons de santé publique)45 ainsi qu’à l’ouverture du droit au CPRF en lien avec les mesures de garde des enfants organisées parallèlement à la reprise des classes en alternance dans les établissements d’enseignement fondamental entre le 25 mai et le 15 juillet 20206 •
Il convient enfin d’indiquer que le nombre de salariés de statut privé ayant bénéficié du CPRF est passé, entre 2019 et 2020, de 35 323 à 66 687 (dont 54 860, soit 82%, pour le CPRF extraordinaire), affichant ainsi une progression de +89%. Sur la même période, le nombre de jours par personne absente a été multiplié par 10, passant de 3 à 30 jours civils.