« Dans une interview publiée récemment dans un hebdomadaire spécialisé en matière de l’agriculture, un grand commerçant domestique de produits agricoles regrette que le gouvernement luxembourgeois ne soit pas disposé à soutenir la construction de grandes serres destinées à augmenter davantage la production de légumes et de fruits sur notre territoire national.
Voilà pourquoi nous aimerions poser les questions suivantes à Monsieur le Ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural :
- Monsieur le Ministre peut-il confirmer cette réticence de la part du gouvernement ? Dans l’affirmative, quelles en sont les raisons ?
- Comment Monsieur le Ministre veut-il déployer la production de fruits et de légumes au Luxembourg à l’avenir ? Quels sont les instruments et méthodes privilégiés par le ministère ?
- Comment Monsieur le Ministre se positionne-t-il par rapport aux techniques du « vertical farming » telles quelles sont étudiées actuellement à l’étranger ? »
Äntwert
Monsieur le Ministre peut-il confirmer cette réticence de la part du gouvernement ? Dans l’affirmative, quelles en sont les raisons ?
L’augmentation de la production de fruits et de légumes est un des objectifs poursuivis par le Plan Stratégique National (PSN) du Luxembourg. Ainsi une des mesures prévues est l’augmentation de 20% du taux d’aide pour les aides à l’investissement liées à ces cultures. La construction de serres, sans limitation de la taille, y est explicitement mentionnée comme investissement éligible.
Il va de soi que ces constructions doivent répondre aux normes légales comme celles fixées par la loi sur la protection de la nature. Seuls les projets qui disposent des autorisations nécessaires peuvent être subventionnés.
Les ministres en charge de l’économie, de l’environnement et de l’agriculture, de la viticulture et du développement rural ont mis en place un groupe de travail interministériel en avril 2021 pour promouvoir l’innovation et la circularité dans la bio-économie et l’agroalimentaire.
L’une des missions du groupe de travail, qui comprend des représentants du Ministère de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural, du Ministère de l’Energie et de l’Aménagement du territoire, du Ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, du Ministère de l’Economie et de Luxinnovation, est d’identifier les obstacles, qu’ils soient financiers, législatifs ou autres, et d’élaborer des solutions possibles.
Ainsi, le groupe de travail est en train d’évaluer les possibilités d’implantation des serres destinées à la production de légumes et de fruits dans des zones existantes ou à créer.
Le groupe de travail est en outre chargé de capitaliser les opportunités dans l’agroalimentaire et la bio économie circulaire afin de faciliter l’implémentation de projets pilotes innovants en agriculture urbaine et en agriculture circulaire, en tant qu’autres solutions de cultivation possibles, en se basant sur des stratégies nationales existantes comme p.ex. la stratégie nationale pour une économie circulaire, la stratégie nationale « Zéro Déchets » , la stratégie nationale urban farming etc.
2. Comment Monsieur le Ministre veut-il déployer la production de fruits et de légumes au Luxembourg à l’avenir ? Quels sont les instruments et méthodes privilégiés par le ministère ?
Comme mentionné ci-dessus, une augmentation substantielle des aides à l’investissement est prévue dans le cadre du PSN. Une autre mesure clé prévue est l’introduction d’une aide couplée aux fruits et légumes. Il s’agit d’une aide à l’hectare, dont le montant initial est de 1.000€ par an.
3. Comment Monsieur le Ministre se positionne-t-il par rapport aux techniques du « vertical farming » telles quelles sont étudiées actuellement à l’étranger ? »
Le « vertical farming » est une technologie qui est encore dans une phase de développement et pour laquelle la compétitivité économique reste à être prouvée. Le « vertical farming » englobe une vision d’une agriculture très technologique, voire connectée, et offre une série d’avantages objectifs en termes de consommation des terrains disponibles, de maîtrise de la production, de diminution d’impacts environnementaux comme p.ex. les besoins limités en eau et en produits phytopharmaceutiques, de la possibilité d’implantation en milieu urbain et la production à l’abri des aléas du climat et des saisons et par voie de conséquence d’amélioration de l’autosuffisance alimentaire des villes et des espaces urbains. Si les fermes verticales peuvent apporter des rendements plus hauts par rapport à l’agriculture traditionnelle tout en consommant moins d’eau, il n’en reste pas moins qu’elles présentent également certains inconvénients et/ou restrictions. Les investissements sont en général importants, et de telles fermes sont très énergivores en comparaison à une culture en pleine terre puisqu’elles n’utilisent que très peu de lumière naturelle pour préférer l’éclairage artificiel de LEDs qui diffusent un spectre lumineux optimal et sur une plus large amplitude de temps. Il s’agit donc d’une technologie intéressante qui pourra, le cas échéant, au futur compléter la production classique.
De manière générale, l’urban farming, incluant toutes sortes de technologies de production primaire hors sol (comme le vertical farming, l’aquaponie, l’hydroponie,…), est un secteur en plein essor, qui peut permettre de contribuer à la sécurité alimentaire et à une société plus résiliente. Touchant à la fois à l’économie circulaire et la digitalisation, c’est un sujet d’importance qui s’aligne avec la feuille de route « Ons Wirtschaft vu muer » du ministère de l’Économie.
L’urban farming ou agriculture urbaine s’impose aujourd’hui non seulement comme une alternative à nos modes de production, de consommation et même de construction traditionnels, mais surtout comme une solution innovante pour favoriser l’économie circulaire et ainsi réinventer nos villes. Dans cette logique, la stratégie nationale urban farming du Ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable est une étude stratégique prospective qui à son tour présente une série de recommandations permettant de faciliter le développement, l’implémentation et la facilitation de l’urban farming, et alimente e.a. les travaux du groupe de travail mentionnée sous 1).
Comme la majorité des business modèles liés à l’urban farming se trouvent à la limite du domaine de l’agriculture et de l’économie traditionnelle, le groupe interministériel mentionné sous 1) a également pour objectif de faire le suivi de tels projets pilotes, de comprendre les limites des systèmes actuels et de réfléchir à des solutions pour faciliter l’implantation future de telles solutions.